D'abord soulever toute ambiguité : l'auteur de ce livre a souhaité signer de son numéro de tatouage, sans indiquer son nom (en fait 52.310, le manuscrit a dû être mal interprété. Il s'agit d'une femme qui avait 22 ans en 45, arrivée par le convoi 58 du 31 juillet 43). Il me semble évident de conserver l'anonymat de cette femme juive déportée de France à Birkenau ; parce qu'il s'agit de son souhait tout d'abord, mais aussi parce que cet anonymat les représente alors toutes. On notera par ailleurs que ce texte a été imprimé en août 45, c'est dire limmédiateté de l'écriture.
La particularité de cet ouvrage, pour moi, est liée à la façon dont il a été écrit du point de vue stylistique (mais sans effet de style). Les faits vécus par l'auteur sont rapportés de façon glaçante, sans édulcoration. Depuis toutes ces années, j'ai lu et entendu un grand nombre de témoignages féminins sur Birkenau. Ils sont toujours terribles, inévitablement, mais il me semble pourtant qu'aucun n'avait la violence terrifiante de ce court opuscule duquel tout état d'âme est absent.

Ed. Fernand Nathan, 1945