[Ce texte est construit en reprenant fidèlement les déclarations de Milton BUKI en réponse aux questions qui lui sont posées. La seule modification apportée est celle des numérotations des crématoires :
j’utilise les dénominations habituelles pour Birkenau de K  II et III ainsi que K IV et V, réservant celle de K I pour le "vieux crématoire" d’Auschwitz]

[Veuillez ne pas piller mon travail de transcription et de traduction par des "copié-collé" mais préciser l'origine et l'auteur en cas de citation. Merci.]

127è jour (14 janvier 1965)

Je m’appelle Milton BUKI, j’ai 55 ans, je suis marié, commerçant et j’habite à Los Angeles. Je suis arrivé à Birkenau en décembre 42 du ghetto de Mława parce que j’étais Juif, et je suis resté jusqu’à l’évacuation du camp. J’ai été mis au Block 14 je crois, juste pour une nuit, et ensuite au Block 2 dans le camp des hommes. C’était un bloc isolé des autres, peut-être était-il entouré de barbelés, je ne suis plus sûr, mais il y avait un garde à la porte. Nous ne pouvions entrer en contact avec d’autres que de manière non officielle, c’était interdit. Nous avions des liaisons néanmoins. Je faisais partie du Sonderkommando. Mon travail dans de ce commando consistait à ramasser les affaires, les rassembler et les trier. À certains moments nous avons été 400 dans ce commando, à d’autres, comme lorsque les transports Hongrois arrivaient, 900. Les membres des Sonderkommando étaient supprimés quand ils étaient jugés trop nombreux. Une fois 200 ont été envoyés à Lublin, une autre fois à Auschwitz I. Il me semble qu’une fois les corps d’un groupe de Sonderkommando ont été amenés à Birkenau pour être brûlés.
Les travaux des Sonderkommando consistaient à brûler les corps, et avant la construction des crématoires ils étaient brûlés dans des fosses. Les corps étaient amenés dans des sortes de camions (Loren, Wägelchen). La première chose qu’il m’a fallu faire à mon arrivée au Sonderkommando en décembre 42 a été de brûler les corps du Sonderkommando précédent. À mon arrivée sur place, les corps en costumes rayés étaient éparpillés partout. Je ne sais plus où c’était exactement, c’était un tel choc de voir ça. Maintenant que j’y pense, je crois que ce n’était pas près des chambres à gaz.
À cette époque, les crématoires n’étaient pas construits, il y avait de petites maisons où les gens étaient gazés. Des maisons chaulées un peu éloignées du camp. Il y avait le Sonderkommando 1 et le Sonderkommando 2, c’était séparé et les fosses de crémations l’étaient aussi. Nous étions 200 environ, nous avions été sélectionnés dans le même transport. Dans chacun de ces Sonderkommando 1 et 2 il y avait donc une centaine de prisonniers. D’autres s’y sont ajoutés ensuite. À chacun de ces deux Sonderkommandos était attribuée une maison où avaient lieu les gazages. Je ne me souviens pas de combien de gens entraient dans chaque maison… 2.000 je crois… peut-être 1.000. J’y suis resté quelques mois. En 43 ont été construits les 4 crématoires mais pas simultanément. Je crois que le K III a été fait avant le K II. Pour les K IV et V je ne sais vraiment plus, d’autant que je n’y suis jamais allé. J’ai été mis au K III.
Des gens étaient gazés dans ces maisons, puis brûlés dans les fosses tous les jours. Ça fonctionnait le jour et la nuit quand des convois arrivaient. La direction était assurée par les SS Kaduk et Moll. Kaduk a été en poste là jusqu’à la fin de la construction des crématoires, ensuite je ne l’ai plus jamais vu. Le chef c’était Muhsfeldt. Je l’ai su en 1946 parce que j’étais témoin au procès de Lüneburg, un procès contre Hössler, Schwarzhuber et d’autres.

[le Président lui demande s’il peut lire la déposition qu’il a faite alors. Milton Buki accepte. En voici le texte]
"Meilech Buki, né le 1er novembre 1909 à Drobin, en Pologne, ait été de décembre 1942 à janvier 1945 en tant que prisonnier politique au camp d’Auschwitz II. J’ai été affecté à un 'Sonderkommando' qui travaillait essentiellement aux crématoires. Comme je l’ai appris, le SS-Oberscharführer Muhsfeldt a été arrêté en tant que 'Bourreau de Majdanek'. Muhsfeldt a ensuite été chef des K II et III à Birkenau et donc aussi mon chef.
Je me souviens très bien comment Muhsfeldt,a lui seul, a abattu 300 prisonniers. On a amené un jour ces 300 personnes depuis le 2ème camp de travail au four crématoire. Muhsfeldt a choisi un homme et lui a ordonné de chanter une valse, en échange de quoi il lui laisserait la vie sauve. Après avoir tué les 300 personnes, il a tué aussi celui qui avait chanté. Bien que les coups de feu n’aient pas tous été mortels et que beaucoup de victimes vivaient encore, il a tout de même donné l’ordre de les emporter dans la salle des fours pour les brûler. A chaque fois qu’une victime tombait, il éclatait d’un rire cynique. De son sadisme particulier, témoigne l’objet qu’il s’était fait spécialement fabriquer : une verge contenant un fil qui dépassait du cuir. Avec, il battait impitoyablement toutes les victimes destinées au gazage et également ceux de notre commando de travail. Un jour il a tué sans raison notre kapo qui s’appelait Kaminski, un Juif polonais. À l’appel, il nous l’a annoncé et a ajouté : "j’en ferai autant avec vous". [selon les témoignages, les survivants s'interrogent : c'est soit Muhsfeldt soit Moll qui a tué le kapo Kaminski, en août 1944, avant la révolte du Sonderkommando, dont il était en effet l'un des organisateurs essentiels].
Après son arrivée à Auschwitz, il a regroupé les commandos de travail séparés. Il a diminué les commandos séparés, mais a exigé néanmoins autant de rendement qu’auparavant. Evidemment on ne pouvait pas en faire autant. Après cela, il nous battait continuellement en disant que nous avions une attitude de saboteurs. En outre, après ces longues journées de travail, le soir, il nous faisait faire encore du "sport punitif" [voir "faire du sport" dans le glossaire].
Une fois, un camarade de travail a secrètement apporté un morceau de pain à un malade de l’hôpital. Muhsfeldt l’a appris et il a tellement battu ce camarade de travail qu’il est mort de ces blessures peu de temps après.
Meilech Buki, Häftlingsnummer 80.312 du camp d’Auschwitz.“  

Voilà pour ce qui concerne Muhsfeldt. Il a donc été chef des K II et III. Mais à mon arrivée au K III, mes supérieurs étaient Moll et Kaduk. Je crois que Kaduk était Unterscharführer bien qu’on l’appelait en lui donnant un plus haut rang, Hauptscharführer, Hauptsturmführer. Quoi qu’il en soit, il ne fait aucun doute qu’il s’agissait bien de Kaduk. Bien que 20 ans se soient écoulés, je crois que je le reconnaîtrais. Après guerre j’ai écrit un livre, en yiddish, et j’y parle de Kaduk. J’ai beaucoup lu sur ce "Schweinehund".  [Cette injure –entre autres- était couramment utilisée par les SS dans les camps. Milton Buki demande ensuite au Président s’il veut bien lui poser des questions précises plutôt que lui demander de raconter parce qu’il se sent très tendu nerveusement et très fatigué].

Donc les gens qui devaient être gazés arrivaient en camions qui allaient jusqu’à 100 ou 200 m des maisons. Je ne sais pas si ces gens arrivaient de la gare, d’Auschwitz ou de Birkenau. Ce que je peux dire c’est ce qui s’est produit pour mon propre transport et supposer qu’il en était de même par la suite. Quand je suis arrivé, j’ai vu comment on séparait les hommes des femmes et des enfants à la descente du train. Nous devions être environ 2.000 personnes dans mon convoi et quelques centaines de jeunes hommes sont allés dans le camp. Les gens sélectionnés pour la petite maison étaient gardés par des SS avec des chiens. Il n’y avait pas d’ordre particulier, ils les faisaient se déshabiller et entrer. Le donneur d’ordres était Kaduk, mais ils étaient nombreux, il y avait les "Wachleute". Moll n’était là que par moments. Il y avait Achtermann… il y en avait d’autres, mais je ne me souviens plus des noms. Donc Kaduk dirigeait l’ensemble. C’étaient des SS moins gradés qui donnaient l’ordre de se déshabiller sur place : "ausziehen !" ensuite ils les faisaient entrer dans les chambres à gaz des deux petites maisons avec les chiens en disant "aufgehen ! aufgehen !" mais les gens ne voulaient pas entrer alors ils les forçaient avec les chiens. Parfois aussi ils étaient trop nombreux. Les dernières personnes amenées étaient les malades et les personnes âgées qui devaient se déshabiller au milieu des vêtements des gens tués où ils allaient être tués sur place eux-mêmes, à l’extérieur, la plupart du temps par Kaduk. Il avait un grand pistolet, parfois même il a fait ça avec une mitrailleuse qu’il portait à l’épaule. Mais je n’ai jamais été militaire, je ne connais pas les noms des armes. Quoi qu’il en soit, il avait toujours une arme sur lui.
Quand le Bunker était plein, ils fermaient les portes et jetaient le zyklon à l’intérieur par une petite fenêtre. C’est un homme particulier, venant du "Sauna" je crois, avec une voiture de la Croix Rouge, qui s’en occupait. La 1ère fois j’avais cru que ce véhicule venait pour s’occuper des malades… Il y avait des médecins.

[Le président suggère une pause que Milton Buki accepte volontiers, il semble en avoir grand besoin.
À la reprise de la séance, le Président dit au témoin qu’il doit lui faire part de l’affirmation répétée de Kaduk selon laquelle il ne serait jamais allé à Birkenau mais toujours resté à Auschwitz. Milton Buki propose alors de donner au traducteur un extrait du texte qu’il a écrit dans l’immédiat après-guerre sur Kaduk, ce qui est accepté. Au fur et à mesure de la lecture de Milton Buki, l’interprète traduit :
"Sur l’ordre de l’Unterscharführer Kaduk, le Kapo répartit le travail entre les divers commandos. Voilà les groupes de prisonniers du Sonderkommando : le groupe 1, groupe des masques à gaz (Gasmaskengruppe) qui tire les cadavres hors du Bunker. Le groupe 2, qui tire les corps vers les wagonnets. Le groupe 3 qui les met les corps sur les wagonnets. Le groupe 4, commando du feu (Feuerkommando) qui lance les cadavres dans les fosses."

Une fois, à l’arrivée du commando, je crois que c’était à 17 h, est arrivé un petit garçon de 10 ou 11 ans, qui s’est mis dans nos rangs. "Qu’est-ce que c’est que cet enfant ?" a dit Kaduk en arrivant. Nous avons répondu que c’était un garçon dont nous ne savions pas d’où il venait. Mais nous savions bien qu’il venait du dernier transport qui ne comprenait que 50 à 60 personnes et dans ces cas-là, ils n’étaient pas gazés, mais abattus, par Kaduk ou par d’autres, ce n’étaient pas toujours les mêmes. Ils n’étaient gazés que quand ils étaient nombreux. Donc cet enfant avait quitté le groupe et s’était joint à nous, alors Kaduk l’a pris par la main, lui a parlé, l’a calmé, l’a amené près d’une fosse et l’a abattu.

J’ai rencontré mon frère une fois. Il avait été amené d’Auschwitz. Bien sûr : on avait amené les "musulmans"… vous savez qui on appelait "musulmans"… il m’a appelé par mon nom… c’était à ces maisons… il venait au gazage… lorsque j’ai entendu mon nom je me suis retourné et j’ai vu mon frère. J’avais déjà pensé à ce que je lui dirais mais je n’ai pas pu. Il a crié "un peu d’eau". Si seulement j’avais eu un peu d’eau pour lui. Et je n’en avais pas.
J’ai demandé à l’Unterscharführer, c’était un homme petit, je ne me rappelle plus de son nom "mon frère est là qui réclame un peu d’eau, est-ce que je peux lui en donner ?" Il y avait de l’eau à la cuisine de Kaduk, c’était une petite pièce où un prisonnier lui préparait à manger. Il a répondu "ce n’est pas autorisé, mais Kaduk y est, demande-lui réponse". Quand j’ai demandé à Kaduk "est-ce que je peux prendre un peu d’eau pour mon frère ?" il m’a frappé. Le Kapo, lorsqu’il a compris que c’était mon frère, m’a dit "tu sais, ce midi, tu iras avec les dix autres dans le camp chercher le repas du commando" pour que je puisse aller là-bas. Entre temps deux hommes du commando avaient tenté une évasion à la nage, ils travaillaient aux ossements, près de l’eau, les résidus d’ossements étaient pilés puis jetés dans l’eau. Mais nous n’avions pas su cette évasion. Bien sûr nous sommes allés au camp le midi pour prendre le repas. Lorsque nous sommes revenus nous avons vu des voitures avec des SS qui circulaient en tous sens mais nous ne savions pas ce qui se passait. Lorsque nous sommes arrivés il y avait Kaduk qui attendait le commando des dix. Il a demandé "mais combien êtes-vous ?" j’ai répondu "nous sommes 10, 10 prisonniers" il m’a injurié ("du, Schweinehund") et frappé "vous êtes 12" et il m’a frappé, des coups de pied et des coups au visage. Ensuite je suis revenu au commando et là on nous a ordonné de rester à plat ventre durant des heures.
   
Après la construction des crématoires, Kaduk n’était plus à Birkenau. Je ne l’ai revu qu’à l’évacuation, sur la route. Peut-être le 19 ou le 20 janvier 45. Cette fois-là je l’ai vu faire comme tous les SS : il abattait ceux qui n’avaient plus la force de suivre la marche et les poussait du pied dans le fossé au bord de la route. Comme le Président dit à Milton Buki que Kaduk assure n’avoir pas participé à la marche d’évacuation, il répond : puisqu’il dit n’avoir pas été à Birkenau, il peut bien prétendre ça aussi. Il était à cette marche. Je l’ai connu. Je l’ai bien trop connu. Puis le Président reprend ses questions et Milton Buki ses réponses.

Je n’ai pas dit que Kaduk avait un chien. Ni Moll d’ailleurs. C’étaient les SS de protection (SS-Leute von der Bewachung) qui avaient des chiens. Les hommes arrivaient à pied la plupart du temps et les femmes, les enfants et les malades en camion.
Il est arrivé que des hommes du Sonderkommando refusent de travailler. Une fois, Moll avait pris deux hommes dans ce cas, les avait enfermés un certain temps dans les fours qui ne chauffaient alors pas, ensuite il les a jetés à l’eau et les a abattus. Moll était là lorsque les crématoires étaient en service, mais il ne restait pas en continu.
Parfois on a envoyé les chiens contre les membres du Sonderkommando qui refusaient de faire un travail.
Et puis il y a eu cette fois où entre 200 et 400 hommes [du Sonderkommando] ont été emmenés et tués. 200 autres sont arrivés de Lublin, parmi lesquels mon beau-frère.
Et il y a eu la révolte… Nous l’avions organisée et elle devait concerner l’ensemble du camp. Un jour avait été déterminé pour la révolte et ce jour-là il y eut un renforcement du nombre de SS parce qu’il y avait des transports. Nous avions évidemment calculé de lancer cette révolte quand les effectifs de SS étaient les plus faibles. Alors, au jour prévu, comme il y avait davantage de SS, le camp a reculé. Nous avons fait la révolte tout de même. Malheureusement, 200 hommes du Sonderkommando ont été tués. J’étais au K III. Nous avions convenu que lorsque nous recevrions le signal –ce signal devait être qu’ils mettent le feu aux paillasses- lorsque nous verrions ce feu, nous en ferions autant. Ils ont mis le feu aux paillasses au K II, mais ça n’a pas bien brûlé et nous n’en avons rien su au K III. Ensuite le Hauptsturmführer Schwarz et Houstek sont arrivés et nous ont enfermés toute la nuit. Le lendemain nous avons repris le travail. De tout le Sonderkommando de mon crématoire, un seul a été abattu parce que les pneus du vélo d’Achtermann avaient été crevés. Achtermann a dit à Houstek : "les salauds, ils ont bousillé mon vélo" alors il en a pris un et il l’a tué. Il n’est rien arrivé d’autre aux gens du K III. En revanche, après cela, nous n’avons plus habité dans une baraque du camp mais à l’étage du crématoire.

Diverses questions sont ensuite posées.

Juge Hotz : combien de temps avez-vous été sous l’autorité de Kaduk ?
Milton Buki : jusqu’à ce que les crématoires aient été finis, c'est-à-dire entre 8 mois et un an, entre mon arrivée en décembre 42 et l’année 43
Président Richter : l’accusé Kaduk nous a déclaré avoir été à l’hôpital du 28 octobre 42 au 21 août 43 parce qu’il avait la malaria
Juge Holz : Kaminski était-il votre Kapo ou le Kapo de l’ensemble des Sonderkommando ?
- c’était mon Kapo. L’Oberkapo était un Reichsdeutscher 
Juge Hotz : où était la cuisine de Kaduk dont vous nous avez parlé ?
- dans un tout petit bâtiment où était le cuisinier, un cuisinier du commando, qui lui préparait ses repas chaque jour. C’était à 300 m du Bunker.
 
- Juge Hummerich : vous avez dit que les gens étaient amenés aux maisons, aux Bunkers, en camions, mais que vous ne savez pas d’où ils venaient. Pouvez-vous nous dire comment ils étaient habillés ?
- en civil. C’étaient des Juifs Polonais, Hongrois, Roumains, Allemands. Mais il y avait aussi les "musulmans" du camp, eux étaient en rayé. Il est arrivé aussi que des gens arrivent en chemise et caleçon ou même complètement nus.

Procureur Kügler : pouvez-vous nous dire quelque chose sur les activités des médecins aux Bunkers ?
- rien de particulier. Il me semble qu’il y avait trois médecins. Les médecins et les SS, quand ils venaient, faisaient diverses expériences sur les prisonniers. Sinon ils étaient aux gazages, ils n’y faisaient rien de particulier, sinon surveiller que le gazage se passe bien, tel était le travail humanitaire des médecins.
 
Partie civile Ormond : vous nous avez parlé de votre frère. Que s’est-il passé pour lui ?
- on l’a amené avec un commando d’Auschwitz et gazé
- quels autres membres de votre famille avez-vous perdus à Auschwitz ?
(Milton Buki demande à son interprète s’il s’agit bien d’un avocat de la partie civile, puis répond)
- je ne peux pas vous les lister tous. Il y a eu ma femme, mes enfants (mon aîné avait 8 ans), ma sœur avec son mari et ses enfants, mon frère avec sa femme et son fils, une sœur avec trois enfants, mes beaux-parents, mon beau-frère, ma belle-sœur.
- le nom de Baretzki vous est-il connu ?
- oui, c’était le Blockführer du camp. Il est venu à la baraque du Sonderkommando. Il venait souvent dans les baraques. La nôtre était surveillée par un garde comme je l’ai dit, afin que personne ne sorte et qu’aucun étranger n’entre. [Il y a alors une coupure et à la reprise] :
Partie civile Ormond : affirmez-vous que la personne mentionnée est morte à la suite des sévices ?
- je ne suis pas médecin, je l’ai seulement constaté en tant que personne, je n’ai pas établi de certificat médical. Nous étions tous dans la baraque. Il est mort ensuite à l’hôpital. Il y avait trois lits séparés pour le Sonderkommando, le Sonderkommando ne devait pas être mélangé aux autres, c’est là qu’il est mort. Au bloc, tout le monde en a parlé. On ne l’a plus revu.

Partie civile Kaul : y avait-il aussi des officiers supérieurs au gazage ?
- oui, chaque fois, mais je ne me souviens plus de la plupart de leurs noms. Schwarzhuber n’y était pas si souvent contrairement à l’Hauptsturmführer Schwarz que j’ai bien connu. Les officiers supérieurs venaient souvent, mais les prisonniers essayaient d’en rester aussi loin que possible.    
- parmi les accusés, qui reconnaissez-vous en dehors de Kaduk et Baretzki dont vous nous avez parlé ? savez-vous si Mulka était aux gazages ?
- je ne peux pas dire.

Défenseur Jugl : vous nous avez parlé de Kaduk à Birkenau qui nie donc y être allé. D’autres témoins ont évoqué Kaduk, mais à Auschwitz, pas à Birkenau
- ils évoquent Kaduk à Auschwitz parce qu’ils étaient à Auschwitz. Quant à moi je n’y suis pas allé, j’ai seulement été à Birkenau, donc je parle de ce que j’ai vu et je confirme que Kaduk a été à Birkenau. 
Président : le témoin Paisikovic qui était au K III a aussi mentionné Kaduk à Birkenau, à la cuisine du B II d et le témoin Szpalerski a évoqué aussi Kaduk au B II d à un repas avec un Oberkapo.

Président : parmi les accusés, n’avez-vous reconnu que Kaduk ?
M. Buki : il y a aussi Baretzki, quand je l’ai cherché parmi les accusés, je l’ai reconnu.
Baretzki : le Sonderkommando du camp était installé au Block 13, pas au 2. Au 2 c’était le bureau de la compagnie (Schreibstube) et au 1 le magasin des vivres. Au Block 13 aucun chef de bloc ne pouvait entrer, sinon le chef de commando du Sonderkommando. De même au Block 11 où seul le chef du commando pouvait entrer, pas les chefs de blocs.
Président : oui, mais il n’a pas dit que vous étiez entré dans le bloc. Il a dit que le garde de nuit était Juif et qu’il n’aurait pas fait attention ni appelé quand vous seriez venu, et là vous auriez battu cette personne.
Baretzki : le garde de nuit aurait été dans le bloc, il n’y avait personne à l’extérieur, durant la nuit. Mais je ne veux pas argumenter avec le témoin sur le 2 ou le 13. Ça s’est produit près du bloc du commando punitif.       
M. Buki : oui, le bloc du commando punitif. Mais vous savez, les blocs ont changé de numéro, alors le Block 2 est peut-être devenu 13 dans la nouvelle numérotation, ou l’inverse. Mais l’homme qui a été battu à mort était à l’intérieur du bloc. Baretzki entrait souvent dans le bloc. Il venait voir les Blockältester pour du schnaps et diverses choses.
Président : y a-t-il d’autres questions ?
Kaduk : je n’ai rien à voir avec Birkenau. Mon supérieur était le Hauptsturmführer Palitzsch et je n’ai été en service qu’au camp souche (Stammlager). A l’évacuation je n’étais pas à Birkenau, je suis arrivé après. Ensuite un témoin a dit ici que j’avais tué un certain Ackermann à la cuisine, Kaduk ne pouvait pas être et au Stammlager et à Birkenau, il n’y a qu’un Kaduk et c’est moi.

Le texte se termine par un échange entre le Président et Kaduk sur l’évacuation.

[Page mise en ligne en 2006].