Un livre qui reconstitue le quotidien d'Auschwitz et Birkenau par le regroupement thématique de témoignages écrits par des survivants immédiatement après leur retour en vue d'informer le plus grand nombre. Contient le texte de Paul Bendel, qui fut médecin auprès du Sonderkommando (prisonnier n°167.460) durant quelques mois (les membres des Sonderkommandos n'étaient pas autorisés à aller à l'hôpital du camp où ils auraient été en contact avec les autres prisonniers). Sa déposition au procès de Lüneburg est évoquée dans cette page du site. Ouvrage enrichi de dessins de François Reisz.
Edition de l'Amicale des déportés d'Auschwitz, 1946.
Un ouvrage collectif de professeurs et étudiants de l'Université de Strasbourg. Ces témoignages individuels ont été rédigés dès le retour des prisonniers. Ils sont présentés de façon chronologique et reconstituent ainsi l'Histoire, depuis les rafles et arrestations jusqu'aux marches de la mort. Dix camps différents sont évoqués dans ce recueil : outre Auschwitz (trois textes, pour Auschwitz 1, Birkenau et Monowitz), Buchenwald, Dachau, Dora, Struthof, Mauthausen, Flossenburg, Neuengamme, Stutthof et Ravensbrück.
Presses Universitaires de Strasbourg, 1947, réédition 1996, 2-86820-714-6
Le convoi n°8 (juillet 42), parti d'Angers directement pour Auschwitz-Birkenau, était composé de 827 Juifs dont 390 femmes. Sur les 801 personnes entrées dans le camp, en 1945 seulement 20 avaient survécu dont une seule femme (informations S. Klarsfeld). Cet ouvrage est préfacé par Henri Borlant (tatoué 51.055 car il fait partie de ces survivants et en témoigne jusqu'à ce jour).
Ce livre est un recueil de témoignages réunis par David Moscovici, notamment celui d'une conférence de son grand oncle, Lazar Moscovici (n°51.251), donnée en 1945 et l'intégralité du texte d'André Lettich (n°51.224) rédigé lui aussi en 1945 sous le titre "34 mois dans les camps de concentration". Il fut médecin au Sonderkommando durant quelques temps, après l'hiver 42 et jusqu'en mars 43. Il évoque ainsi notamment le Bunker 1 et les K II ou III.
Editions du retour, 2009, 978-2-9526769-3-9
Un ouvrage sous-titré "Essai pour surmonter l’insurmontable" et il n’est pas certain que ce terme d’ "essai" soit à entendre de façon univoque lorsqu’on sait que l’auteur qui écrit "l’outrage de l’anéantissement est indélébile" s’est suicidé en 1978. Il s’agit du livre d’un homme dont la langue d’origine est l’allemand. Un ouvrage au style limpide et clair qui nous rend le contenu d’autant plus proche. L’auteur s’arrête en particulier sur la place spécifique de "l’intellectuel humaniste" dans les camps (par rapport au croyant ou au politique), sur le rapport à la réalité et à la mort, sur le "besoin de la terre natale" et –peut-être surtout- sur la torture, sujet sur lequel il livre des pages d’une densité rare laissant l’impression que l’on peut parfois s’approcher de l’incommunicable de ce vécu.
Actes Sud, 1995 pour la traduction Française, ISBN 2-7427-0362-4.
Détenu au camp de Buchenwald puis de Gandersheim, l’auteur en raconte le quotidien et, à travers lui, propose une réflexion de fond sur l’humain, tout en nous menant aussi près que possible de la compréhension de situations et ressentis extrêmes.
Gallimard, coll. Tel, 1957.
Né en 1909 près de Łódź, l'auteur grandit en Pologne puis décide de venir vivre en France (Lorraine) lorsqu'il a 18 ans. Les deux raisons qu'il invoque pour ce choix sont l'antisémitisme qui ne fait qu'augmenter dans la Pologne des années 20 et son image de la France (outre le fait qu'une partie de sa famille y est déjà installée). Arrêté en 42, il sera déporté en juin. Son ouvrage autobiographique évoque l'ensemble de sa vie jusqu'à son retour à Nancy au printemps 45. Il est très factuel et évoque notamment tous les commandos de travail (et les conditions qui y régnaient) dans lesquels il a été affecté durant ses trois ans à Auschwitz, Birkenau, Eintrachthutte et à la Buna de Monowitz.
Presses Universitaires de Nancy, 1989, ISBN 2-86480-382-8
Né en 1910 à Berlin, opposant au nazisme, condamné dès 1937, l'auteur sera finalement envoyé à Auschwitz et employé en tant que prisonnier électricien à la "neue Wäscherei". Il s'engagera dans la construction de l'Allemagne de l'Est après guerre et son livre est très empreint de cette situation. Pour autant, la rumeur d'une auto-censure entre la première et la dernière version de l'ouvrage est infondée, même si les convictions politiques sont très apparentes (place consacrée aux profits réalisés dans les camps par les entreprises allemandes de l'Ouest comme Krupp ou Siemens par exemple, ou dénazification illusoire après guerre). Au-delà de ces thèmes, le sujet de cet ouvrage, comme son titre l'indique, est la mise en place d'une résistance interne et ses caractéristiques, tant humaines (et nominatives donc), que concrètes (les différents groupes, leurs activités mais aussi leurs dissentions) et psychologiques (analyse des réactions et comportements). Les membres du Sonderkommando et la révolte ne sont curieusement évoqués que sur 4 pages. Les prisonniers sont présentés avec la phrase "bien entendu aucun d'entre eux n'était volontaire" et la révolte est essentiellement citée comme un double marqueur : de la résistance juive et de la solidarité internationale.
1ère éd. Kleine VVN Bücherei en 1949, Kongress Verlag pour l'éd. revue en 1962.
Un ouvrage inhabituel, en trois parties : le témoignage de Maurice, survivant de Birkenau, le journal de l'attente de sa femme Rose et un texte d'Annette Wieviorka rappelant seulement les traits saillants de ces deux textes et présentant les documents patiemment cherchés et retrouvés par Yves Moreau dans les archives locales.
Maurice Benroubi, Juif grec (ne parlant ni yiddish, ni allemand) est arrivé en France en 1928. Il vivait dans la Sarthe. Il a été déporté par le convoi n°8 (comme André Lettich et Henri Borland, notamment). Il a passé un court temps affecté au Sonderkommando en juillet 1942, peu après son arrivée, à creuser des fosses et y déposer des corps (p. 21). Comme il l'avait déjà déclaré à Jean-Claude Pressac, il écrit que les prisonniers du Sonderkommando (dont il estime ne pas faire partie) les insultaient et leur jetaient des pierres (p.47). Mais il évoque surtout Jawichowitz (sous-camp où les prisonniers travaillaient dans les mines) où il a été majoritairement affecté. Son texte, rédigé bien après-guerre, est construit de façon tout à fait particulière. Il ne semble pas avoir été écrit selon un plan précis, chronologique ou thématique, mais au fil de la pensée, alternant le témoignage, les points de vue et l'évocation des dégâts définitifs causés dans le quotidien par un tel passé. Ce choix, inhabituel et intéressant, nous permet d'accompagner le vécu de "l'après-camp" de Maurice Benroubi. Il nous aide à comprendre quelque chose de la façon dont tous les éléments du quotidien, aussi anodins puissent-ils être, évoquent pour un survivant tel ou tel élément vécu au camp. Il me semble qu'il s'agit de l'un des points essentiels de son témoignage, cette façon dont il "continue de vivre à Auschwitz" parce que tout le renvoie à ce passé indépassable.
Le texte de Rose, sa femme, est un journal qu'elle écrit à l'intention de Maurice et dans l'attente de son retour. Elle ne doute pas qu'il reviendra, parce qu'elle ne peut pas concevoir qu'un amour comme le sien soit brisé. Ce sont des pages qui documentent les inquiétudes de la vie de cette jeune femme juive et son petit garçon durant l'occupation. Il s'agit là d'un témoignage par ailleurs très émouvant, que Jacques, l'un des fils de Rose & Maurice, nous donne aujourd'hui à partager.
Ed. Albin Michel, Coll. Bibliothèque Histoire, 2013, ISBN 978-2-226-24624-0.
Né à Varsovie en 1923, l'auteur arrive à Paris à l'âge de sept ans. En août 44 il est déporté à Auschwitz. En 2001, l'auteur de polars décide d'écrire ce livre de témoignage. On y retrouve son phrasé incisif, son sens de la formule, au service d'une narration de son vécu du quotidien du camp. Il détaille particulièrement dans ce livre les journées du 17 et du 27 janvier 45 (il n'a pas participé à l'évacuation). Un ouvrage bourré d'humanité même si l'auteur s'en défend et continue à se demander pourquoi les Polonais dans leur grande majorité ont considéré que "les ennemis de nos ennemis sont nos ennemis". (A voir ici une intéressante interview de l'auteur)
Seuil, coll. Points n°1335, 2002, ISBN 2-02-081774-8
L'auteur est née à Varsovie en 1929. Elle témoigne dans ce livre, écrit en 1964-65, de son vécu durant les années 1939 à 45. Les cent premières pages décrivent le quotidien du ghetto de Varsovie, d'où elle sera déportée à Majdanek puis à Auschwitz (Birkenau) en 43, auquel elle consacre également cent pages. Elle témoigne dans une langue directe de tout ce qu'elle a vu, vécu et ressenti et des différents Kommandos auxquels elle a été affectée (Weberei, Kartoffel, Kanada, ...) jusqu'à l'évacuation et aux "marches de la mort" qui la conduiront à Ravensbrück (jusqu'à la mi-février) et Neustadt-Glewe (environ 100 km à l'Est de Hamburg) où elle sera libérée le 2 mai 45 par les Soviétiques.
Ed. du Musée d'Auschwitz, 2008 pour la traduction en français due à Corinne Rouach (1ère parution en 1967 en polonais), ISBN 83-60210-66-6
Un texte écrit immédiatement au retour de Birkenau (le manuscrit était terminé avant la fin de l'année 45) par une femme arrêtée en janvier 44 qui témoigne avec précision de tout ce qu'elle a vu et dû traverser. De Drancy elle arrive à Birkenau, tatouée n°74.837, elle raconte la quarantaine, le Kommando des marais, celui des pierres, le Revier ; l'indispensable solidarité entre certaines prisonnières et l'épouvantable attitude de certaines Kapos et autres Stubowa...
Ed. Livre français, 1946. Réédité en 2003 par l'Amicale des déportés d'Auschwitz et des camps de Haute Silésie sous l'ISBN 2-7407-0022-9
Né en 1922 en Ukraine, l'auteur grandit en Pologne où il se destine à la poésie. En 1943 il est arrêté par la Gestapo et déporté à Auschwitz en tant qu'Aryen. Durant l'été 44, il est transféré à Dachau. Il se suicidera en 1951. Cet ouvrage est en effet celui d'un littéraire, mais aussi d'un prisonnier non Juif, violemment ironique et d'une douloureuse amertume dans son regard sur l'humain. Certains l'ont rapproché des textes de Primo Lévi, mais à mon sens, c'est confondre ce qu'il y a de précieux dans la relation quasi-scientifique de celui-ci, avec des mots qui relèvent davantage d'une cruauté du désespoir dans le témoignage de Borowski.
C.Bourgois, 2002 (1è éd. française : Calman-Lévy, 1964), ISBN 2-267-01043-7
Après que le père de l'auteur se soit engagé pour la France en 1914, ses parents se sont mariés en 1920 à Paris et ont été naturalisés en 24. La famille est arrêtée à Clermont-Ferrand en novembre 43. Sam Braun a alors 16 ans. Ils sont déportés par le convoi 64. Tatoué n°167.472 à l'arrivée, Sam est directement envoyé à Monowitz où il restera jusqu'à l'évacuation. C'est le parcours qu'il explicite ici, dans un document rédigé avec l'aide de Stéphane Guinoiseau à partir d'entretiens menés ensemble et des notes que Sam Braun a écrites à son retour des camps. Il insiste beaucoup sur la dimension humaniste qui lui semble fondamentale. (On peut l'entendre et retrouver son témoignage oral dans deux textes du blog annexé au présent site en cliquant ici).
Albin Michel, 2008, ISBN 978-2-226-18073-5
Né en 1922 en Pologne et arrivé l'année suivante en France, il sera agent de liaison à partir de la fin 40. Dénoncé, il est arrêté en janvier 44 et déporté à Auschwitz le mois suivant. Il sera affecté à Monowitz jusqu'à l'évacuation. Il nous livre ici son témoignage comme il l'a fait un nombre incalculable de fois dans des établissements scolaires et autres lieux (voir l'ouvrage Et pourtant cela fut... et cette vidéo).
Ce livre est construit autour de sa fraternelle amitié pour Jacques Nichli, comme une colonne vertébrale. Une solidarité sans faille qui -outre les facteurs chance et hasard, toujours indispensables- a permis que tous deux survivent. L'auteur retrace son parcours au travers de l'évocation de diverses personnes, déportés, Kapos, SS ou civils, qui sont autant d'occasions d'éclairer un aspect de la réalité (actes choquants ou héroïques, conditions de vie ou de travail, ...)
Paris Ed. du Relié, 1ère éd. en 2003, ISBN 2-354900-73-1
Ecrit d'après les notes prises immédiatement après son retour, le livre de M. Cling, né en 1929 à Paris est celui d'un garçon "bien élevé", c'est à dire un enfant attachant et naïf, insouciant et joyeux. D'autant plus terrible en est sa découverte d'Auschwitz que l'on accompagne avec épouvante. L'auteur, connu pour ses activités à la FNDIRP et par son témoignage dans un certain nombre de documentaires, propose ici une narration incroyablement distanciée du parcours du prisonnier A-5151 dont la valeur informative est évidente, d'autant qu'il a eu à connaître un grand nombre de Kommandos peu ou pas évoqués par ailleurs. D'utiles notes en bas de pages complètent, par des informations diverses apprises après-guerre, le récit du vécu.
Ed. de l'Atelier, 2008 (1ère éd. 1999), 978-2-7082-4028-5
Le premier des trois volets du témoignage de l'auteur qui fut déportée en 43 de Compiègne pour Auschwitz. Une narration comme une incantation pour évoquer le quotidien d'une femme dans le nulle part de ce lieu d'épuisement et de torture. Un style extraordinaire et inédit au service d'un propos : donner un accès supplémentaire à l'approche de la compréhension de la réalité du camp des femmes qui n'est pas permis par le seul sens des mots. Un texte intense qui fait approcher la notion du temps arrêté dans la souffrance.
Editions de Minuit, 1970, ISBN 2-7073-0290-2.
L'auteur a été déportée à Birkenau (n° A-22.350) après avoir vécu le ghetto de Tarnów, la ville où elle est née en 1926, puis le camp de Plaszów. Elle expose ici, avec le soutien de Dany Boimare, ce terrifiant parcours (durant lequel tous les membres de sa famille seront assassinés) ainsi que ses réflexions et ressentis. Un témoignage livré tardivement qui évoque très peu Birkenau, mais s'attarde notamment de façon très intéressante sur l'évolution du quotidien entre l'invasion de la Pologne et l'ouverture du ghetto de Tarnów, ainsi que sur Plaszow. Les "deux auteurs" cherchent également à mettre en mots ce rapport différent à la vie qu'ont ensuite les survivants des camps.
Ed. E-dite, 2007, 2-846-08225-9
Les notes et dessins de l'auteur rédigés à son retour ont d'abord été publiés en 1947. Juive et communiste, elle entre dans la Résistance dès 40 (FFI région toulousaine). Elle est arrêtée sur dénonciation le 20 avril 44 (après ses parents et son frère, morts à Auschwitz). Torturée par la Gestapo à la Chancellerie du Reich, elle est transférée à Drancy puis Birkenau (convoi 72). Peintre, elle relate la vie du camp dans ces textes par une succession de touches qui crééent un tableau d'ensemble par adjonction des unes aux autres. Un regard sur l'humain à la fois dur et tendre. Postface Sylvie Jedynak et Vincent Lacoste.
Ed. Mille et une nuits, rééd. 2005, 2-84205-894-1.
Le témoignage du père, Moshe, qui a tenu à ce qu’il soit écrit par un de ses fils, ce fut Elie. Moshe Garbarz est né et a grandi en Pologne, et son livre commence par ce récit du quotidien d'un enfant Juif dans une banlieue de Varsovie durant les années 20 et 30. Il raconte ensuite comment il est venu à Paris, puis a été déporté à Auschwitz, Birkenau puis Jawischowitz (avec un vécu détaillé sur ce camp annexe de Birkenau) et l’épouvantable et interminable marche de la mort qui l’a mené à Buchenwald. Dans sa préface, Elie précise comment Moshe réclamait la "transparence" c’est-à-dire un texte qui ne cherche pas de littérarité mais de la vérité à chaque mot. C’est en effet ce témoignage-là qui est donné à lire, dont on voudrait remercier le courage et du père puis du fils.
Du point de vue du sujet de ce site, l’auteur présente un cas rarissime : ayant travaillé (en tant qu’électricien) auprès d’un Sonderkommando, il est parvenu à tromper la vigilance des SS pour le quitter.
Ed. Plon, 1984, ISBN 2-259-01089-X
Né en 1930, l'auteur est déporté de Berlin et arrive fin juin 43 à Birkenau avec sa mère. Il est connu aujourd'hui pour la publication d'un grand nombre de dessins parmi ceux qu'il a réalisés sur Auschwitz et Birkenau au printemps 45, depuis Buchenwald, après la libération de ce camp. Aucun ne figure dans le présent livre, qui est une rédaction de son parcours en trois chapitres. Le 1er est une courte mais intéressante évocation de l'Allemagne jusqu'aux débuts de 43 (pour les 50 premières pages), le second est la narration de son vécu du camp d'Auschwitz (plus de 200 p) et le dernier celle de l'évacuation et son passage à Gross-Rosen puis Buchenwald (30 p).
Aucune indication ne permet hélas de savoir quand ce témoignage a été rédigé. L'intérêt majeur de ce livre (par ailleurs très bien écrit) est d'en apprendre davantage sur la "Maurerschule" d'Auschwitz 1 et de mesurer combien un prisonnier très jeune vit le quotidien du camp d'une façon fondamentalement différente de celle des adultes. On notera la façon dont la révolte du Sonderkommando de Birkenau (7 oct 44) a été vécue concrètement à Auschwitz 1 (l'auteur ignorait ce qui s'était passé) et l'absence, en toute logique, d'évocation des "prisonniers des crématoires" puisque l'auteur a été rattaché au Stammlager durant toute sa détention.
Ed. allemande en 1993 sous le titre "Geraubte Kindheit : Ein Junge überlebt den Holocaust", éd. française en 2011, ISBN : 2-35013-275-4
Madeleine est née à Paris dans les années 20 de parents qui avaient émigré de Pologne. Jacques, lui était né à Varsovie mais arrivé à Paris à six mois. Ils se rencontrèrent alors qu'ils avaient une dizaine d'années et décidèrent de ne plus se séparer. Ils se marièrent en 39 et bientôt leur naquit une petite fille. Mais, engagés dans la Résistance, ils furent arrêtés et déportés ensemble à Auschwitz au printemps 44 (convoi 72). Séparés dès leur arrivée au camp, ils ignoraient leur survie réciproque. Ils se retrouveront au Lutetia en 45. Le retour à la vie ne sera pas facile pour autant. C'est l'ensemble de ce parcours que nous raconte ici Madeleine, avec amour et humour, malgré tout.
Ed l'Archipel, 2006, 2-7441-9852-6
L'auteur, né le 05 mars 1922 à Lodz, arrivé en Belgique à trois ans, est arrêté à Anvers le 31 octobre 42 et déporté le jour même de Malines (convoi XVII) pour Auschwitz. Transféré ensuite à Varsovie le 31 août 43 (où il restera 11 mois) il arrive à Dachau en août 44 d'où il sera libéré le 30 avril 45. Il écrit ce témoignage immédiatement.
Le fait qu'il évoque les ruines du ghetto de Varsovie -où seuls quelques milliers de prisonniers ont été envoyés d'Auschwitz pour déblayer les ruines et où beaucoup sont morts du typhus- fait partie des éléments rendant ce témoignage intéressant du point de vue de l'Histoire.
Pour la relation de ce parcours, il s'attribue le nom de Max Gorder (distanciation ? littérarité ? vraisemblablement les deux) et c'est donc à la 3ème personne qu'il raconte son parcours et la souffrance morale, éthique, qui s'ajoute à la souffrance physique, car la première leçon d'Auschwitz, insupportable, est que la culture ne protège pas de la barbarie. Sylvain Gutmacher se suicidera au printemps 48.
Cet ouvrage inclut des poèmes et deux contes de l'auteur.
Ed. Riveneuve et FMS, 2010, 978-2-36013-016-0
L'auteur, née en juillet 1928, a été déportée avec ses parents par le convoi 75 parti de Drancy le 30 mai 44, à la veille de ses 16 ans. Outre le fait qu'il a été écrit en 1946, l'intérêt spécifique de ce témoignage réside dans les indications qu'il peut nous donner sur la façon dont une jeune fille de milieu bourgeois (et non une adulte) peut regarder, saisir et essayer de s'adapter à un univers tel que celui de Birkenau. Ce livre contient également des informations spécifiques sur le Block des enfants tel qu'il était à la toute fin de 44.
Ed. La Découverte, coll. Témoins, 1992, 2-7071-2163-0
L'auteur de ce livre était Directeur de l'Ecole Nationale de Police. Lui-même a été déporté à Dachau. Or, dès la libération de ce camp, se sont constitués des "comités" pour chaque pays. Il entre dans le comité français et à ce titre recueille sur place des témoignages de prisonniers sur les divers camps cités dans le titre (orthographe conforme au livre). Sa volonté est celle de "la précision et la rigueur d'un réquisitoire". Cet ouvrage est donc écrit "sur place" et regroupe les paroles de 32 témoins survivants. Ils évoquent majoritairement les sévices, mais aussi, en ce qui concerne Dachau, donnent des détails sur le crématoire. En ce qui concerne Auschwitz, les deux témoins les évoquent également (K II et III) pour avoir dû participer à leur construction.
Ed. Desvigne, Lyon, 1947
L’auteur, né en 1929, est déporté en 1944 à Auschwitz. Dans cette autobiographie, il retrouve le vécu spécifique de l’horreur concentrationnaire que peut avoir un adolescent. Tardivement connu et reconnu, il a reçu le prix Nobel de littérature en 2002 et ses ouvrages sont donc désormais lus partout dans le monde. "Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas" (édité en 1990 chez Actes Sud, comme l’ensemble de l’œuvre de cet auteur) est désormais mis en scène pour le théâtre et très favorablement accueilli. "Etre sans destin" a fait l'objet d'un film (voir cette rubrique).
10/18 Domaine étranger, 1975 en Hongrois, 1998 chez Actes Sud, ISBN 2-264-03381-9
De la mise en place d'Auschwitz à l'évacuation et au-delà, le témoignage d'un prisonnier arrivé dans le premier groupe de politiques Polonais le 14 juin 40 (n° 290 !) Un document qui donne donc de très nombreuses informations sur l'histoire du camp, les différences selon les époques, au travers de l'histoire individuelle de son auteur, un témoin non Juif qui rapporte parfois ce que personne d'autre n'a pu revenir pour raconter (au Revier du camp souche et à Birkenau notamment).
Robert Laffont, 1980 (1ère parution pol. en 1972, puis en all. en 1979), ISBN 2-221-00568-6, préfacé par David Rousset.
Juif déporté de Malines à Auschwitz (puis Groß Rosen et Buchenwald après les "marches de la mort"), l'auteur commencera à écrire cet ouvrage dès sa libération en avril 45. Après une relecture où il décide de tempérer son propos originel "ce n'était qu'un cri de vengeance" note-t-il dans la postface, il le publie en 1946. Ce livre témoigne du vécu de l'auteur et de certains aspects du camp en s'appuyant sur des personnes marquantes (certains SS ou Kapos pour leurs comportements inacceptables / certains camarades de camp). Parmi les informations spécifiques concernant Auschwitz (évoqué dans les trois premiers chapitres sur les huit que comporte l'ouvrage), il évoque le "Schädlingsbekämpfung Kommando" dont il a fait partie. On remarquera que pas un mot ne figure sur la révolte des Sonderkommandos, en regard du fait que l'auteur n'a été détenu qu'à Auschwitz I.
Bruxelles : Ed. Beka, 1946.
Un ouvrage (titre original : "Weiter leben" : continuer à vivre) qui porte une parole de femme partie vivre aux Etats-Unis après la guerre. Elle y parle de l’hier des camps depuis un ici et maintenant (comment "ne pas rester captif de ce présent impossible"), des différents types de regards que portent les personnes extérieures et de toutes les questions qui se posent aux survivants, dans une expression directe et sans concession.
Ed. Viviane Hamy, 1992 en allemand, 1997 en français.
Ce livre, écrit immédiatement en 45, est parmi les tout premiers témoignages à paraître. Il a pour son auteur deux objectifs : rendre hommage à son père Henry Kohen qui n'a eu de cesse d'essayer de protéger les Juifs de France (avec le peu de moyens que peut avoir un individu, qui plus est dans la France de Vichy, mais avec une énergie et un courage considérables) et faire connaître l'existence et les modalités de fonctionnement de Drancy, d'Auschwitz (Monowitz) puis de l'évacuation tels qu'il a eu à traverser ces épreuves. Il ne peut rien apporter de décisif aujourd'hui sur le plan informatif parce qu'à l'époque son propos était de donner les grandes lignes permettant de faire connaître l'existence de ces lieux et de ces faits.
On notera, dans le texte annexé du journaliste Soviétique Charrow (paru le 13 février 45) l'évocation d'un groupe de 80 Russes sélectionnés pour le Sonderkommando qui refusèrent ce travail. Ils furent évidemment immédiatement assassinés.
Ed. 1946, Paris.
Par ce texte (130 p) qui est d'abord un hommage à la mémoire de sa famille dont tous les membres ont péri durant la Shoah (en particulier ses parents, ses frères et sa soeur), l'auteur résume son parcours, d'abord à l'intention de ses enfants avant qu'il ne soit destiné à publication. Il se fonde -outre sa mémoire bien entendu- sur ses notes prises en 1946. Il sera d'abord au ghetto de Varsovie (rue Mila !) puis dans celui de Lodz (ancienne rue Ribna) jusqu'à sa suppression lors des convois de déportation pour Auschwitz en 44 (voir ici les pages sur Lodz). Il restera ensuite douze jours à Birkenau avant d'être envoyé vers un autre camp (Hohenstein bei Chemnitz). Un chapitre de ce texte est par ailleurs consacré à Chelmno où ont péri nombre de Juifs de Lodz et tous les "Tziganes" qui y avaient été déportés.
2è éd. Biblieurope & Fondation pour la Mémoire de la Shoah, 2007, ISBN 978-2-84828-097-4
L'auteur (1921-2012) dit que l'essentiel de ce témoignage a été écrit dans les années 60, bien qu'il ait été publié dans les années 90. En été 39, il a 17 ans et est autorisé pour la première fois à des vacances autonomes qui l'enchantent. C'est ainsi que commence ce livre. En hiver 40, il apprend que des militaires partent s'engager "dans l'Armée polonaise en France". Il va très vite décider, avec un ami, de rejoindre ces troupes. Ils n'y parviendront pas : capturés en Slovaquie, ils seront envoyés dans diverses prisons puis à Auschwitz en décembre 1940, où ils deviennent les prisonniers 6.800 et 6.804. Ce livre va donc témoigner de la réalité du camp dans les tous premiers temps de son existence. August Kowalczyk restera à Auschwitz I Stammlager durant un an et demi (toute l'année 1941 et jusqu'à juin 42).
L'intérêt majeur de cet ouvrage est donc qu'il relate des particularités relativement mal connues du fait du petit nombre de survivants de cette première époque. L'auteur raconte notamment le Bauhofkommando et l'Abbruchkommando (démolitions et récupération de briques dans Oświęcim devenu Auschwitz pour construire des bâtiments dans le camp). Activités à l'extérieur du camp, donc, qui permettent des relations entre prisonniers et "Organisation clandestine des femmes polonaises d'Oświęcim" (antenne de la ZWZ, Związek Walki Zbrojnej qui deviendra l'AK en 42) avec l'accord de certains SS acceptant de se faire soudoyer. Ces relations permettaient de procurer de la nourriture et des médicaments aux prisonniers, et de faire transiter du courrier entrant et sortant.
L'autre grand intérêt du livre est l'évocation de la SK (Strafkompanie, commando disciplinaire : si besoin, voir ce mot dans le glossaire) et de la mutinerie du 10 juin 42 : les prisonniers tenteront de s'évader, seuls 9 réussiront, dont August Kowalczyk. Il explique comment et détaille l'aide qui lui a été apportée par les polonais aux alentours du camp.
Ed. Musée d'Auschwitz. Première publication en 1995 en polonais : Refren kolczastego drutu, et en 1998 pour la traduction française d'André Giaro. ISBN 83-88526-31-6.
L'ouvrage de survivants du camp qui ont fait partie du "Kampfgruppe" et sont devenus historiens. Ce livre contient une interview de Filip Müller (ancien prisonnier du Sonderkommando). Il s'agit de son tout premier témoignage dans l'immédiat après-guerre, qui est un entretien avec son ami Slovaque mené dans la structure hospitalière où Filip Müller a dû rester plusieurs mois au sortir des camps.
Berlin : Dietz, 1957, d'abord écrit et édité en Tchèque en 1946, ISBN 3-320-01636-9
Comment rendre compte d'un tel livre ? L'historien Dov Kulka (Université de Jérusalem) a enregistré ses réflexions concernant la façon dont il évoque Auschwitz pour lui-même, loin de son travail de chercheur. C'est une mise en page de ces enregistrements d'un homme de soixante cinq ans qui nous est proposée ici, ainsi que quelques extraits de son journal puis un article écrit cette fois par Dov Kulka l'historien, sur le Theresienstädter Lager.
Un regard sur une enfance atypique (de Theresienstadt au "camp des familles" de Birkenau, où il restera jusqu'à l'évacuation de janvier 45, il a alors 10-11ans) dont l'auteur cherche à nous faire partager les sensations et les émotions (ou leur absence), très loin donc de la narration et de la relation de faits précis telles que nous les connaissons par ailleurs dans les témoignages de survivants. Des textes forcément intimes, mais pudiques à la fois. "Son Auschwitz", c'est la Métropole de la Mort, une "mythologie privée" qu'il décrypte aussi en compagnie des écrits de Kafka. Il y interroge certains de ses rêves, l'hypothèse de l'absence de Dieu, évoque les prisonniers du Sonderkommando (des ombres devant les fours). Il ne recherche pas de souvenirs, même s'il s'étonne de devoir fouiller sa mémoire pour faire revenir à la conscience des scènes de violence qui, pourtant, étaient évidemment quotidiennes, mais on constate alors qu'il les vivait dans une présence-absence, une distance, permettant vraisemblablement de se protéger. Très certainement aussi, le fait qu'il était enfant lui donnait ce regard particulier, qui n'est d'ailleurs pas sans faire écho à certaines pages d'Imre Kertesz, qui lui aussi était très jeune. De ce fait, cet ouvrage donne à la fois une sensation de légèreté, mais aussi de profondeur, même si l'auteur se refuse à la sonder et nous en laisse éventuellement la charge.
A plusieurs reprises, Dov Julka revient sur les deux aspects de son rapport à Auschwitz (le travail de l'historien / le vécu du survivant) et c'est un étrange va-et-vient entre les recherches de l'adulte et le vécu de l'enfant qu'il s'efforce de maintenir dans deux espaces distincts -ou qu'il souhaiterait être tels. Une autre particularité (étrangeté ?) est cette volonté qu'il a de ne pas lire de témoignages de survivants, ne pas voir le film Shoah, ne pas aller à Yad Vashem, ce qui, à l'image finalement de l'ensemble de cet ouvrage, laisse pensif.
Éditions Albin Michel, 2013, traduit de l'anglais par P-Emmanuel Dauzat, ISBN 2-226-24520-5
Déportée en mai 44 avec ses parents, son mari et ses deux fils, tatouée sous le n°25.403, l'auteur était médecin et femme de chirurgien. Elle fut seule de sa famille à revenir de Birkenau.
Son livre, écrit immédiatement à son retour, est de ce fait un témoignage très riche, sur le camp des femmes en particulier et sur tous les aspects concernant la santé. Hélas, l'auteur mèle le très précieux de ce qu'elle sait pour l'avoir vu personnellement, au flou voire à l'erroné de ce qu'on lui a dit tel qu'elle s'en souvient. De ce fait, le propos est affaibli et certaines informations ne peuvent être considérées comme certitudes.
Ed. du Bateau ivre, 1946, trad. du Hongrois.
Un ouvrage de référence désormais dans le monde entier. Primo Levi, au travers de cette autobiographie, nous livre une réflexion de fond sur Auschwitz et sur l’être humain avec la distance et l’esprit d’analyse du scientifique qu’il était. Primo Levi a beaucoup témoigné, en particulier dans les lycées où il venait répondre aux questions de ses lecteurs. Dans cette édition, il propose en annexe les réponses aux questions qui lui étaient les plus fréquemment posées.
Juillard, coll. Pocket n°3117, 1987 pour la traduction française, 1947 pour la première édition en Italie ("Se questo e un uomo"), ouvrage passé presque inaperçu, avant d’être réédité en 1958 et traduit depuis en de nombreuses langues, ISBN 2-266-02250-4
Cet ouvrage (édité en 1986 en Italie) contrairement au précédent cité ici, ne tient plus de la narration autobiographique sur laquelle et à partir de laquelle Primo Levi portait sa réflexion, mais propose l'inverse : une réflexion de fond basée sur son propre vécu et sur les divers témoignages accessibles depuis, afin d'approcher des réponses aux multiples questions que pose la Shoah (en particulier : structures du camp, relation bourreau/victimes, ressentis et attitude des prisonniers, ...) Un livre précieux.
Gallimard, coll. Arcades, 1989, 2-07-071511-6
Un petit livre étrange, d'abord par son titre : La Zone grise car le titre de l'ouvrage en ialien était Intervista a Primo Levi, ex deportato. En fait, il s'agit de la retranscription des échanges de deux historiens (A. Bravo et F Cereja) avec Primo Levi. Il semble que ce soient eux qui focalisent sur ce thème de la zone grise, et particulièrement Anna Bravo, qui en fait un décryptage -usages et mésusages de la notion- dans sa postface (p 133 à 154). En fait, Primo Levi y revient sur diverses caractéristiques des camps déjà évoqué dans ses principaux livres (s'il n'en fallait lire que deux, Si c'est un homme et Naufragés et rescapés me paraissent être les deux incontournables). Il répond également à des interrogations sur la transmission, à la fois ce qui se transmet consciemment et inconsciemment, mais aussi la transmission orale directe au travers des interventions dans les établissements scolaires en tant que témoin survivant. Primo Levi évoque par ailleurs son rapport négatif aux écrits de Bettelheim, ainsi que les courriers qu'il reçoit et qui le mettent en position archétypale de survivant qui détiendrait "toutes les réponses". Il s'étonne notamment qu'on l'interroge souvent sur des questions ayant trait à la religion, lui qui n'est pas croyant, et se demande s'il faut voir, dans ces questionnements récurrents, une évolution sociétale particulière.
C'est, bien entendu, l'occasion aussi d'évoquer (en quelques phrases) les prisonniers des Sonderkommandos. Même si Primo Levi a écrit par ailleurs que "le jugement sur eux reste suspendu" (in Les Naufragés et les rescapés) on retrouve ici, une fois de plus, une association d'idées effrayante où il relie trois thèmes dans une même continuité de pensée : les hommes qui se comportent comme des monstres / les Sonderkommandos / le peu de suicides dans les camps.
Le principal intérêt de ce livre est sans doute sa publication sous forme de transcription rigoureuse, car l'éditeur précédent avait choisi, pour plus de fluidité à la lecture, de retravailler le texte.
L'entretien (du 27 janvier 1983) est précédé de deux textes : l'un de Carlo Ginzburg, l'autre de Federico Cereja, et postfacé donc par Anna Bravo.
Éditions Payot & Rivages, 2014, ISBN 2-228-91025-5
Arrivée fin janvier 43 et portant le n° 32.292, l'auteur est arrivée à Auschwitz d'une prison polonaise. Elle détaille dans ce livre tous les aspects de la vie du camp tels qu'elle les a vus et tels qu'elle les a compris. Curieusement, elle ne nomme personne (à l'exception de quelques camarades de misère dont elle ne donne que le prénom) et insiste beaucoup sur les convictions politiques qui l'ont aidée à constituer un petit groupe d'entraide physique et morale ayant permis -avec le hasard, toujours omniprésent bien sûr- sa survie.
Nagel, coll. Documents contemporains, 1945.
Première parution de ce livre : 1974. L'auteur, Juif communiste militant dans la Pologne d'avant-guerre puis actif dans les Brigades d'Espagne, s'engage en France en 39. Démobilisé en 40, il devient Résistant. Il est arrêté en 42 et envoyé de Drancy à Auschwitz où il portera le n° 54.297 (12è convoi, arrivé le 31 juillet. Sur 784 déportés hommes et femmes sélectionnés pour entrer dans le camp, 5 hommes seront survivants en 45). Il construit son livre autour de six personnalités de Kapos qu'il a eu à connaître de près pour avoir fait partie de leurs Kommandos. Outre l'intéressante étude humaine (pouvoir et abus de pouvoir en fonction des personnalités) ce texte est aussi un témoignage sur de nombreux aspects de la vie du camp dès 1942, que ce soit Auschwitz 1 ou, en moindre mesure, Birkenau.
Syllepses, coll. Mauvais temps, 2005, préface d'E. Traverso, 2-84950-034-8
Maxi Mardochée Librati, né en 1925 à Lyon, a été déporté dans le convoi 59 parti de Drancy le 02 septembre 43. Il propose ici un témoignage où Birkenau est très peu évoqué parce que, de la quarantaine, il a directement été envoyé dans un convoi pour Varsovie en octobre 43. C'est de mon point de vue l'intérêt majeur de ce livre, car les témoignages de ces prisonniers envoyés pour "nettoyer les ruines du ghetto" après la révolte ne sont pas nombreux. En outre, il a fait partie du "Todeskommando", chargé de la crémation des corps retrouvés dans les décombres.
La seule chose qui me paraisse regrettable dans ce livre à l'écriture très fluide, c'est qu'il n'y a pas d'indication de la date à laquelle il a été écrit (visiblement, l'auteur l'a repris avant publication pour ajouter quelques commentaires).
Ed. par Yad Vashem Publications en 2008, ISBN 965-308-304-2
D'abord soulever toute ambiguité : l'auteur de ce livre a souhaité signer de son numéro de tatouage, sans indiquer son nom (en fait 52.310, le manuscrit a dû être mal interprété. Il s'agit d'une femme qui avait 22 ans en 45, arrivée par le convoi 58 du 31 juillet 43). Il me semble évident de conserver l'anonymat de cette femme juive déportée de France à Birkenau ; parce qu'il s'agit de son souhait tout d'abord, mais aussi parce que cet anonymat les représente alors toutes. On notera par ailleurs que ce texte a été imprimé en août 45, c'est dire limmédiateté de l'écriture.
La particularité de cet ouvrage, pour moi, est liée à la façon dont il a été écrit du point de vue stylistique (mais sans effet de style). Les faits vécus par l'auteur sont rapportés de façon glaçante, sans édulcoration. Depuis toutes ces années, j'ai lu et entendu un grand nombre de témoignages féminins sur Birkenau. Ils sont toujours terribles, inévitablement, mais il me semble pourtant qu'aucun n'avait la violence terrifiante de ce court opuscule duquel tout état d'âme est absent.
Ed. Fernand Nathan, 1945
Quarante ans après, l'auteur de ce livre, devenu analyste, parvient à faire part de ses souvenirs. Jeune médecin Hollandais et Juif, il est déporté pour Auschwitz en avril 43 (au départ de Malines, qu'il décrit) avec la jeune femme dont il est amoureux. Il connaîtra un statut très privilégié (eu égard aux conditions vécues par les prisonniers de Birkenau) dû à son statut de médecin, à l'hôpital d'Auschwitz 1 puis au laboratoire de Rajsko (avec le Dr SS Münch). Son témoignage insiste en particulier sur l'importance et le rôle dans l'augmentation des chances de survie, durant le temps passé au camp, de l'existence mémorielle d'une vie normale avant le camp et permettant de se projeter dans l'après-camp grâce à une présence chaleureuse.
Ed. Belles Lettres, Coll. Confluents psychanalytiques, 1990, 2-251-33445-9
L'auteur commence à tenir ce journal peu après la libération d'Auschwitz (où il était resté à l'hôpital) et le poursuit jusqu'à son arrivée par bateau au port de Marseille. Dans un premier temps, il raconte son quotidien, puis très vite évoque ce qu'il a vécu à Birkenau et Monowitz. Cet ouvrage intéresse le sujet des Sonderkommandos parce que l'auteur rend compte d'un entretien (p.70 à 77) avec Noah Oksenberg qui dit avoir fait partie de ce commando durant près de deux mois (juillet / août 43).
FMS et Le Manuscrit, 2006, 2-7481-7458-5
Witold Pilecki, officier polonais, se fait volontairement rafler à Varsovie pour être envoyé à Auschwitz (n°4.859) afin d'y organiser un réseau de résistance intérieur. C'est cet incroyable parcours qu'il nous raconte ici. Il a rédigé ce document en 1945, soit deux ans après son évasion (et deux ans avant sa condamnation à mort pour trahison !) Il reste au camp de septembre 40 à avril 43. A cette date, il décide finalement de s'évader, après presque 3 ans au Stammlager, du fait de la conjonction de deux faits : son réseau, patiemment construit, est peu à peu démantelé par les nombreux transferts de prisonniers polonais vers d'autres camps mais aussi -et peut-être surtout- la tête de l'organisation à Varsovie, à laquelle il fait parvenir ses rapports, ne donnera jamais son aval pour un soulèvement. Il est terrible et vertigineux de lire (année 42) : "Depuis quelques mois, nous étions capable de prendre le contrôle du camp pratiquement tous les jours. Nous attendions l'ordre de le faire. [...] Il nous fallait le soutien et l'ordre du haut commandement de l'Armée de l'Intérieur"...
W Pilecki a logiquement construit son texte de façon chronologique, en trois parties, qui correspondent à ses années d'enfermement. Ce témoignage, très factuel et très précis, donne à voir les étapes de l'évolution de la construction matérielle du camp, mais son plus grand intérêt tient sans doute aux informations qui nous sont données quant aux modalités de fonctionnement du tout début du camp, pour lesquelles les témoignages sont fort rares.
N'ayant jamais été envoyé à Birkenau, il en est très peu question, et cela nous indique aussi, en creux, le peu de choses qu'on pouvait en savoir lorsqu'on était prisonnier au Stammlager, alors même que W Pilecki, grâce au réseau qu'il construisait jour après jour et à la variété de Kommandos de travail dans lesquels il est passé, faisait très certainement partie des mieux informés. Il n'évoque pas vraiment non plus les prisonniers du Krematoriumskommando puis des premiers Sonderkommandos à Auschwitz 1, mais peut-être n'a t-il pas eu d'informateur (dans un Leichenträgerkommando susceptible d'entrer au KI, par exemple).
L'écrit de W Pilecki est proposé avec de petits encarts d'informations générales, au fil du texte, sur tel ou tel aspect évoqué par l'auteur, rédigés par Isabelle Davion, Maître de conférence à la Sorbonne et membre de l'IRICE (comme Annette Wieviorka, qui, par ailleurs, signe la postface). L'idée est judicieuse, mais les informations sont parfois approximatives ou confuses, voire erronées. Par ex, si on ne considère que quelques pages, lorsqu'elle annonce "1 à 4 chambres à gaz" dans les K de Birkenau (p.173) : aux KII et III il y en avait 1 ou 2 selon les époques, et trois aux K IV et V. Elle indique la date de juillet 42 pour le premier groupe de Sonderkommando (p.175) : mais si tel était le cas, comment auraient fonctionné, avant cette date, le KI et le Bunker 1 qui étaient déjà en service ? Ou bien encore, concernant le procès d'Auschwitz à Francfort qu'elle qualifie de "procès des médecins d'Auschwitz" (p.177) : il semble qu'elle fasse confusion avec l'un des procès de Nuremberg, en effet appelé "procès des médecins".
La bibliographie annexée en fin d'ouvrage me semble également poser problème. Une première liste de 6 titres, sous l'appellation "ouvrages fondamentaux" renvoie, outre un ouvrage de Primo Levi et les volumes de Auschwitz 1940-1945 de Wacław Długoborski et Franciszek Piper, à deux textes auxquels a participé Tal Bruttmann avec Annette Wieviorka, et deux livres d'Annette Wieviorka. Les ouvrages de Hermann Langbein ou celui sur la résistance dans le camp de Józef Garliński en revanche sont étonnamment renvoyés dans les "ouvrages complémentaires" alors que ces deux auteurs sont des survivants d'Auschwitz qui ont participé à la Résistance intérieure du camp et sont devenus par la suite des historiens. Sur le sujet de la résistance dans le camp, ce sont d'évidence les ouvrages fondamentaux.
Ed Champ Vallon, coll Époques, 2014 pour la traduction française (Urszula Hyzy et Patrick Godfard), ISBN 978-2-87673-955-0.
Les lettres proposées ici furent écrites à l'intention des membres de sa famille par un prisonnier d'Auschwitz 1. Il faisait partie du commando des géomètres (Bodendienstwirtschaftskommando) au sein duquel les prisonniers avaient plus de latitude que les autres pour communiquer avec la résistance autour du camp. C'est par leur intermédiaire que ces lettres sans censure ont pu parvenir à leurs destinataires. Elles ont été remises au musée d'Auchwitz après-guerre par la famille de l'auteur. Elles sont ici présentées par F. Piper et accompagnées de documents. Le nom de Janusz Pogonowki-Skrzetuski, prisonnier n°253, est relativement connu car il a fait partie du premier convoi de Polonais vers le camp (juin 40), mais surtout parce que ce jeune homme (18 ans en aoüt 40) était l'un des 12 "prisonniers-géomètres" pendus le 19 juillet 43 sur la place d'appel, en représailles des trois évasions dans ce Kommando.
Cet ouvrage montre surtout la personnalité d'une intégrité sans faille de l'auteur, et sa générosité au travers de ses actes (notamment le fait que ses liens avec l'extérieur lui fournissaient des médicaments qu'il faisait entrer au camp en quantité avec un considérable courage).
Muzeum d'Auschwitz, 2007, 83-921567-1-0
L'auteur, née en 1898, protestante, et déportée par le convoi du 30 juin 44 a écrit ce témoignage dès sa libération, alors même qu'elle se trouvait encore en Pologne. Elle mourra en 1972 sans avoir vu son manuscrit publié. Il dessine en creux le portrait d'une femme remarquable. Issue de la petite bourgeoisie de France, dirigeant un cours de danse célèbre avant guerre, rien ne semblait la prédisposer à affronter l'adversité avec un tel courage. Arrêtée pour faits de résistance (distribution de tracts notamment) elle est déportée à Drancy avec son mari -qui n'est pas Juif- en novembre 43 et transférée à la Deutsche Dienstelle, elle fait donc partie des rares personnes pouvant en témoigner (tri de tous les biens volés aux Juifs). Elle racontera ensuite son enfermement à Birkenau (tatouée A-8616) avec une liberté de ton et une rigueur aussi intéressantes l'une que l'autre. Jean-Marc Dreyfus (Université de Manchester) signe un long commentaire à la suite du manuscrit qui l'enrichit de diverses informations, il y retrace également l'ensemble de la vie de l'auteur et en particulier son parcours à Hollywood après guerre.
Larousse, 2010, 978-2-03-585042-3
Jeune fille hongroise, elle est raflée avec sa famille et tous les Juifs de sa ville. Arrivée à Birkenau dans la nuit du 29 mai 44, elle est tatouée A-11.684. Ce texte est son journal, qui commence avec l'arrestation de la famille. Elle décrit surtout le quotidien vécu à Birkenau avec sa mère et sa soeur. Ce manuscrit a été rédigé immédiatement après sa libération à Belsen. Elle sera ensuite accueillie en Suède puis choisira de vivre au Danemark.
Ed. Esprit ouvert, 2008, 978-2-88329-101-0
Elève à St Cyr, arrêté par la Gestapo à 21 ans alors qu'il tentait de rejoindre les troupes d'Afrique du Nord, non Juif, l'auteur va être déporté de Compiègne en été 43 et être transféré de camp en camp avant d'arriver à Birkenau. Là, il sera tout près des K II et III. Outre le fait que ce témoignage a été rédigé immédiatement, sa précision et sa rigueur toutes militaires en font un texte utile et évidemment fiable.
Herault Editions, 1988 (1ère éd. 1945), 2-903851-50-6
Dans ce gros volume, l'auteur relate sa vie de façon simple et directe, depuis son enfance dans la ville de Debrecen où il est né en 1928, jusqu'au début de l'année 46 avec son arrivée à Paris et ses retrouvailles avec son frère et sa soeur. Cette phrase sous-entend les multiples niveaux de lecture et dit en creux tout l'intérêt de ce livre (merci à sa fille qui l'a convaincu de s'atteler à cet travail d'écriture). En effet, nous sommes ici invités à partager une grande variété d'informations, au travers de la narration des souvenirs de son auteur.
- La vie d'une famille juive dans la Hongrie d'avant-guerre, puis la terrible évolution (voire le renversement) de la situation avec Miklós Horthy puis les Croix fléchées de Szálasi, les bataillons de travailleurs forcés juifs (dont 1/3 va périr), et la population hongroise non juive que Nicolas (Miklós) Roth juge très sévèrement, à la mesure de la déception d'un groupe qui se pensait tout aussi Hongrois que leurs frères. Il décide d'ailleurs à ce moment-là de ne jamais retourner vivre en Hongrie après guerre, et ne changera pas de point de vue.
- Le quotidien dans le ghetto de la ville à partir de sa mise en place en mai 44 jusqu'à la déportation en juin. L'auteur note que ce sera la première occurrence d'un contact avec un Allemand en uniforme (jusqu'alors, toutes les situations étaient gérées par des Hongrois).
- La survie à Auschwitz (à la DAW, et à Huta en particulier).
- Le camp de Dachau où a abouti la "marche de la mort" qui l'a concerné.
- Les suites de la Libération, les camps pour DP et sa situation en Italie, qui est particulièrement détaillée.
Cette liste rapide indique sans doute suffisamment clairement la richesse de cet ouvrage. Je noterai par ailleurs que, en ce qui concerne Auschwitz en particulier, outre l'apport spécifique du témoin -ce qu'il a dû traverser, les Kommandos par lesquels il est passé, etc- nous avons ici un regard tout à fait spécifique : celui d'un adolescent. Une richesse supplémentaire pour qui s'intéresse notamment aux aspects psychologiques de la survie au Lager, aux stratégies conscientes et à celles qui sont intuitives, spontanées.
Les prisonniers du Sonderkommando ne sont pas évoqués (Nicolas Roth est au Stammlager), sauf lorsque l'auteur est dépositaire du témoignage d'un jeune Slovaque, ce qui lui procure un sentiment de malaise et de pitié dont il dit que l'horreur lui pèsera longtemps.
Ed. Le Manuscrit et La FMS, 2011, ISBN 978-2-304-03544-5.
[Si vous ne lisez pas son témoignage, vous pouvez écouter Miklos Roth ici].
Arrêté pour faits de résistance, l’auteur sera déporté à Porta, Westphalica, Neuengamme, Helmstedt et Buchenwald. Cet ouvrage, écrit dès son retour des camps, sera et reste essentiel pour découvrir le mode de fonctionnement des camps et approcher le vécu des prisonniers, comment "l’homme se défaisait lentement chez le concentrationnaire". Du témoignage individuel comme information générale.
Hachette, coll. Pluriel, 1946.
Ce témoignage est écrit dès son retour par un survivant (n° 8.214). Il donne à connaître la Strafkompanie (compagnie disciplinaire à la mortalité considérable) dans laquelle il est envoyé quelques mois après son arrivée à Auschwitz pour avoir "organisé" deux assiettes d'épluchures à la cuisine du camp. Il y passera plus d'un an ce qui est "unmöglich" (impossible, incroyable) et fait de lui "eine Rarität im Lager" comme le lui dira le SS Aumeier. Il témoigne ainsi du quotidien mal connu de la Strafkompanie, mais aussi de l'attitude du SS Moll qui était alors en charge de ce Kommando de punition, du Block 11 et en particulier de la première expérimentation de gazage (chapitres 7 et 8).
Hanovre : Das andere Deutschland, 1948
L'auteur, médecin français, né à Lvov en 1909, est arrêté en banlieue parisienne en juillet 43. Déporté à Auschwitz, il sera d'abord envoyé au sous-camp de Jaworzno qu'il participe à construire d'août 43 à janvier 44. Il restera ensuite longuement à Birkenau où il retrouvera un ami, le Dr Pach (alors médecin des Sonderkommandos). Cette relation lui permettra, au printemps 44, de fréquenter le Block 13 des prisonniers du "Sonder" qu'il évoque durant quelques pages qui paraissent hélas représenter une part infime de ce dont il aurait pu témoigner à leur propos.
L'une des autres particularités de ce livre, sans doute en partie parce que son auteur est médecin -donc spécialiste du corps en quelque sorte- est de faire approcher autant que faire se peut l'intensité de l'épreuve physique par des descriptions très fortes, étonnamment détaillées. Pour clore ce livre, qui est une sorte de compte-rendu de tout ce que Fred Sedel a vu et enduré, l'auteur propose, dans un épilogue très intéressant lui aussi, ajouté en 1988, une réflexion sur lui-même en tant que survivant et sur la façon dont il vit depuis, "quarante ans après [sa] mort", avec la mémoire du camp pouvant revenir "aussi présent qu'au premier jour".
Auschwitz, Kaufering, Birkenau, Landsberg, Sachsenhausen, Oranienburg, Jawozno.
Métailié, 1990, ISBN 2-86424-085-8 (1ère édition La Palatine, 1963).
Le 1er mars 1995, les deux hommes échangent sur leurs expériences concentrationnaires. C'est cette conversation que propose ce petit livre très dense. Ils vont évoquer la diversité des vécus, la situation du politique (venue solitaire et solidaire) par rapport à celle du Juif (venue familiale), l'attitude au retour (le silence voulu par le survivant ou le silence auquel il est contraint), et enfin l'importance du témoignage malgré la douleur qu'il implique.
Ed. Mille et une nuits n° 85, 1995, 2-84205-026-6.
Cet ouvrage est particulier à divers titres. Tout d'abord parce que la date à laquelle il a été écrit n'est pas connue : le manuscrit a été trouvé au domicile de son auteur, après son décès par accident en 1974. Il laisse par ailleurs une impression étrange. L'auteur, un Juif Grec d'Athènes, est déporté en avril 44. Il arrive à Birkenau à un moment où les SS affectent au Sonderkommando de nombreux prisonniers. Il explique que ses deux beaux-frères y sont envoyés, qu'ils travaillent "à l'intérieur" du crématoire et lui "à l'extérieur". Il détaille bon nombre d'éléments du quotidien du K II ou III, ainsi que la révolte, disant que ce sont des explications données par les membres de sa famille. En revanche il n'évoque pas du tout ce qu'il en est de son propre Kommando (sur les activités il dira seulement qu'ils construisent un bâtiment et "organisent" des dents en or, et rien sur le quotidien de ce Kommando, sur les autres prisonniers, le Kapo,...) Et puis, le 24 octobre, il est transféré dans des sous-camps de Groß-Rosen (Breslau et Kaltwasser), qu'il situe au Nord de l'Allemagne, et dont il décrit les épouvantables conditions de travail. Il n'en sera libéré, in extremis (32 kg, mains et pieds gelés, quasi mort de faim) que le 08 mai 45.
Ed. Lycabettus Press, 1983 pour la trad. en anglais de Nikos Stavroulakis.
Des textes retranscrits de témoignages recueillis par un reporter rattaché à l'Imperial War Museum (GB). Ils sont présentés en successions de thèmes organisés de façon chronologique. L'une des particularités de l'ouvrage est qu'il inclut des témoignages d'enfants qui furent évacués vers l'Angleterre et de soldats qui participèrent à la libération des camps.
Presses de la Cité, 2007, ISBN 978-2-258-07164-3
Anne-Lise Stern, née juive allemande, déportée à Birkenau en avril 44 (convoi 71), n° 78.765, deviendra psychanalyste française. Il s'agit du même convoi que 34 des 44 enfants d'Izieu, que Marceline Loridan-Ivens, Simone Veil.
Cet ouvrage, sous-titré : "Camps. Histoire. Psychanalyse" est un recueil de textes. Les premiers, écrits en été 1945, sont suivis de divers articles, puis de certaines de ses prises de parole lors de son séminaire bimensuel à la Maison de l'Homme, à Paris, qui eut lieu durant des années.
Ce groupement de textes donne à voir le parcours d'Anne-Lise Stern et son apport à la psychanalyse de ce "savoir-déporté". Il montre la constante revendication pour une prise en compte nécessaire de l'après-camp, le refus d'entendre auquel elle a fait face, le rôle de Lacan à entendre ce savoir dans le domaine analytique, à "réinventer la psychanalyse dans un monde où Auschwitz avait eu lieu".
En préface, un texte de Nadine Fresco (historienne) et Martine Lebovici (philosophe) : "Une Vie à l'oeuvre".
Éditions du Seuil, coll. La librairie du XXIè siècle, ISBN 2-020-66252-9
L'auteur, Polonaise née en 1916, a été déportée à Birkenau en tant que politique en 1942 (pour action de Résistance). Elle a écrit le présent témoignage dès son retour, la première édition date de 1945. Elle a été suivie de nombreuses autres et de traductions en diverses langues. La première particularité de ce livre -outre son style que l'on qualifierait volontiers de lyrique si ce n'était le sujet- est que l''auteur n'y parle pas à la première personne mais se propose de témoigner, au travers de ce qu'elle a vécu elle-même, de ce qu'ont traversé toutes les prisonnières politiques polonaises. L'intérêt spécifique de cet ouvrage réside dans différents aspects. Le premier est lié au fait que peu de femmes aient ainsi survécu à trois ans à Birkenau puis témoigné, Seweryna Szmaglewska nous propose donc une vue générale quasi unique de l'évolution du camp selon les diverses époques, et de l'évolution spécifique du camp des femmes en particulier. Elle nous fait découvrir des Kommandos dont l'évocation est plus que rare, telle la colonne 117 de Budy (avant que n'y soit envoyé le Strafkommando) ou la colonne 115 dite "Fischerei" (Harmenze). Une autre particularité est que ce témoignage permet, par comparaison, de mettre en lumière les différences de traitement entre prisonnières juives ou non juives. On notera enfin que son regard sur les prisonniers du Sonderkommando est très virulent, bien qu'elle en parle malgré tout très peu, il ne s'agit que de quelques phrases dans un gros ouvrage. Ils sont vus comme des hommes ayant perdu "tout principe et toute intégrité", elle va jusqu'à supposer et écrire que, dans la chambre à gaz, les victimes les considèrent comme "des traîtres".
Ed. Auschwitz Museum, 2001, 83-88526-03-0 (1ère éd. 1945)
Rudolf Vrba propose ici une autobiographie à laquelle on reprocha parfois d’être romancée sur certains aspects. Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un témoignage précieux, évoquant de façon détaillée la vie du camp à Birkenau où il a été affecté à différentes fonctions (par ex. service de Rampe ou Kanada) et où il a eu à connaître de façon proche le destin des Theresienstädter. Il est parvenu à s’évader en compagnie d’Alfred Westler le 07 avril 44 (avec, entre autres, des informations transmises par Filip Müller à son ami A. Westler). Ils ont rédigé un texte informatif, espérant notamment éviter les déportations massives de Hongrois qui allaient avoir lieu…
Ramsay, 2-84114-569-7
Jo Wajsblat est un jeune Juif Polonais de 15 ans lorsqu’il passe la porte de la chambre à gaz du K IV à Birkenau en octobre 44. Le médecin SS Mengele va ordonner de rouvrir et fera sortir quelque personnes… Cinquante ans après, il raconte son histoire.
J’ai lu n°6468, 2001, ISBN 2-290-32328-4.
Ce livre traite de la situation des Juifs à partir de 33 en Europe de l'Ouest comme toile de fond puis détaille particulièrement la situation des Français Juifs et s'arrête surtout sur l'étude aussi exhaustive que possible du camp de transit de Drancy et ses évolutions à partir d'août 41. Sur un livre de 340 pages hors annexes, moins de 40 pages sont consacrées à Auschwitz. L'objectif principal de cet ouvrage est donc de rédiger l'histoire de Drancy. C'est le livre d'un homme qui parle à la fois en tant que chercheur (en biologie, mais il a d'évidence mené des recherches d'historien sur les sujets traités) et en tant que témoin. Arrêté en décembre 41, il aura à connaître Compiègne puis Drancy d'où il sera déporté en été 44 (arrivé à Birkenau le 4 juillet 44). La double situation de chercheur et de survivant n'est pas rare mais rend ici l'ouvrage curieux. Il tient par exemple à nous faire connaître en détails les comportements (effectivement remarquables de droiture et d'intelligence) de certains de ses amis prisonniers puis de lui-même. On est parfois amené à se demander si certains passages ne sont pas dictés par la culpabilité à être survivant, s'il n'est pas question également pour l'auteur de se justifier d'avoir pu rester si longtemps à Drancy sans être déporté (en tant que "conjoint d'aryenne") et d'y avoir exercé des fonctions, de même que d'avoir survécu à Birkenau grâce à son statut de "Prominent" en tant que personnel médical (sa relation de cette étape est pour moitié au moins celle des secours qu'il put apporter à deux jeunes garçons). Enfin l'auteur nous propose de façon inhabituelle ses points de vue sur divers sujets (concernant l'intégration des Juifs, le sionisme, l'Etat d'Israël,...). Pour autant tout cela n'enlève rien, bien évidemment, à son étude extensive de Drancy.
Fayard, 1973
Plutôt que (mal) présenter une fois encore ce livre…
"Jamais je n’oublierai cette nuit, la première nuit de camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée.
Jamais je n’oublierai cette fumée. […]
Jamais je n’oublierai ce silence nocturne qui m’a privé pour l’éternité du désir de vivre. […]
Jamais je n’oublierai cela, même si j’étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même.
Jamais."
Ed. de Minuit, préfacé par F.Mauriac, 1958, ISBN 2-7073-0407-0.
Le témoignage d'une prisonnière politique polonaise sur Auschwitz puis Birkenau. Elle arrive de la prison de Pawiak (Varsovie) le 25 août 43. Après la découverte épouvantée d'Auschwitz ("die Wiese", "die Quarantäne", "die Aussenkommandos"), elle est affectée au Kanada puis envoyée à Birkenau ("Zentrale Sauna" et Kanada) pour l'enregistrement des nouvelles prisonnières et la récupération de leurs biens. Elle explique avec courage et honnêteté comment -avec une nourriture largement suffisante et des vêtements à disposition du fait de son travail- disparaît le souci d'autrui. En l'occurence le souci des autres prisonnières qui meurent à quelques dizaines de mètres, dans les pires conditions de dénuement, voire des déportés menés aux crématoires tant qu'ils ne sont pas individualisés. Son témoignage démontre aussi comment, lorsqu'on était employé(e) au Kommando Kanada, on avait également une liberté de mouvement telle que rien de ce qui se passait au camp ne lui était inconnu. Elle donne ainsi quantité d'informations détaillées. Enfin, il est très intéressant de comparer les différences de traitement au camp entre ses conditions de survie et celles des prisonnières juives. Une postface, rédigée par l'un de ses fils, nous apprend que... Krystyna Żywulska est le nom sous lequel elle a été arrêtée en tant que Résistante, celui qui a été son identité durant tout le temps passé entre les mains des nazis, celui qui figurait sur ses papiers aryens lorsqu'elle s'est évadée du ghetto de Varsovie, car elle était Juive et s'appelait Zofia Landau.
1ère éd. en polonais 1946, éd. Polonia en français 1956.