Oświęcim est une petite ville Polonaise dont les Allemands ont traduit le nom en Auschwitz. Elle est située en Haute Silésie (annexée par le Reich en 1939), à 60 km environ de Cracovie. Le climat de cette région est continental : très chaud en été et jusqu’à moins 30 en hiver.
À la mise en place de ce camp, la population Polonaise a été délogée dans un rayon de plusieurs kilomètres. Dans cette zone, des maisons (estimation à un millier) ont été démolies, d'autres ont été conservées pour être attribuées à des officiers SS (ils expulsèrent la population en différentes étapes, la première en juin 40 aux environs de l'ancienne caserne qui devint Auschwitz 1 et la dernière au printemps 41 pour les villages de Brzezinka, Budy, Rajsko,... soit au total sur 40 km²) C’est le plus grand des camps de concentration (celui qui fut le plus peuplé) et d’extermination (celui qui possédait le plus grand nombre de fours et causa la mort du plus grand nombre de personnes).
Ce camp sera développé sur trois lieux principaux, c’est pourquoi on parle soit d’ « Auschwitz » sans autre mention : il s’agit alors de l’ensemble du complexe, soit d’ « Auschwitz I, II et III » qui en sont les trois parties.
Entrée d'Auschwitz I - Photo fonds personnel, 2006.
Auschwitz I est le « camp souche » (Stammlager), le camp d’origine. Le choix de ce lieu (ancienne caserne Polonaise) date du 21 février 1940. Sa construction (remise en état des bâtiments existants et construction de nouveaux bâtiments) a débuté en mai 1940. Les prisonniers fournissaient la main d’œuvre. Achevé, ce camp est constitué de 28 Blocks et un crématoire, le KI. Il a contenu jusqu’à 20.000 prisonniers. Pour plus de détails, voir la page consacrée à Auschwitz I en particulier.
Portail d'Auschwitz II Birkenau - Photo fonds personnel, 2006.
Auschwitz II a été mis en place à Birkenau (village Polonais de Brzezinka) à moins de 3 km du camp souche. C’est un camp de dimensions considérables. C’était à la fois un camp de concentration (prisonniers -jusqu'à 100.000- assujettis à divers commandos de travail) et d’extermination (deux bâtiments prééxistants réaménagés en chambres à gaz sous le nom de Bunker 1 et 2, puis quatre crématoires : les K II, III, IV et V). Une page spécifique, plus détaillée, est consacrée à Birkenau. Vous trouverez également sur le site (les liens sont cliquables) une page consacrée au K I, une pour le K II, une pour le K III, une pour le K IV, une pour le K V, une pour le Bunker 1 et une pour le Bunker 2.
Monowitz, usine Buna, photo d’archives.
Auschwitz III est aussi appelé Monowitz. Il était situé à 14 km de Birkenau, près de Monowice. Les prisonniers y étaient employés dans diverses entreprises telle la Buna Werke, la plus connue, spécialisée dans la fabrication de caoutchouc dans le domaine chimique, par IG Farben, visible sur cette photo d’époque. Sa zone d’activités était étendue sur plusieurs hectares. Son installation a commencé en février 41 à proximité de la gare de Dwory. (Il s'agit de l'entreprise évoquée par Primo Levi, voir la médiagraphie).
Au départ les prisonniers étaient amenés chaque matin du camp souche (éloigné de 7 kms environ) en wagons de marchandises. Le camp lui-même a été mis en place en octobre 42. Il était situé au Sud Est de cette zone. Il comportait 45 Blocks + 6 Blocks pour le HKB (témoignage et plan dessiné par S. Smulevic, survivant, visibles sur le site de D. Natanson).
Le travail des prisonniers pour diverses entreprises allemandes n'a pas été anodin. La force de travail étant inépuisable (il "suffisait" de sélectionner à leur arrivée le nombre de déportés nécessaires), beaucoup d'entrepreneurs se sont montrés intéressés par le potentiel de ces "ouvriers" qui représentaient une main d'œuvre fort bon marché (les entrepreneurs ne payaient que quelques RMarks par prisonnier à la SS). Krupp par exemple décide au printemps 43 d'installer une usine métallurgique, qui commencera à fonctionner en septembre de cette même année.
D'autres entreprises ont été recherchées pour des besoins spécifiques : on trouve ainsi trace de contacts pris par les SS avec une firme de Breslau en septembre 42 en vue d'une étude sur l'utilisation des cheveux humains (avec lesquels des étoffes seront effectivement tissées). En effet, tous les prisonniers étaient rasés, qu'ils soient sélectionnés ou non.
De nombreux camps annexes dans la "zone de développement" (38 ou 39) étaient rattachés à Auschwitz III. Ainsi, par exemple : Budy, Fürstengrube, Gleiwitz, Harmense ou Plawy parmi les plus souvent cités. Les activités étaient minières, industrielles ou agricoles (comme Rajsko, à l’Ouest de la rivière Sola) avec notamment d’immenses serres. Il ne reste rien de tout cela aujourd’hui.
Rudolf Höss, dans son interrogatoire du 1er avril 46, donne de nombreuses informations dont quelques points seront résumés ici (la page générale concernant les biographies de SS ayant servi à Auschwitz est en lien ici). Après être allé à Dachau et Sachsenhausen, il devient commandant du camp d’Auschwitz en mai 40 (nommé par Glücks). Il fait réparer les bâtiments de l’ancienne caserne d’abord, avec trente prisonniers amenés de Sachsenhausen (droits communs Allemands), puis fait construire de nouveaux bâtiments avec deux à trois mille prisonniers livrés par la Gestapo de Katowice (prisonniers politiques Polonais) sur l’ensemble de l’année 1940.
En janvier 1941, 8 à 9.000 prisonniers, tous Polonais, sont à Auschwitz 1. Au printemps 41 Himmler y vient en visite pour envisager un agrandissement. Le projet : une capacité de détention de 30.000 prisonniers à Auschwitz 1 et la création d’un second lieu (qui allait être Birkenau) d’une capacité de 100.000 prisonniers. Höss utilisa 10.000 prisonniers de guerre Russes (arrivés début octobre 41) pour construire Birkenau. Leurs conditions de "vie" étaient tellement épouvantables que quatre mois après leur arrivée, fin janvier 1942, 8.000 étaient morts. Le traitement infligé aux prisonniers de guerre Soviétiques fut ensuite modifié. La situation militaire sur le front de l'Est n'évoluant pas aussi favorablement que le souhaitaient les nazis, ces prisonniers de guerre furent davantage employés dans des usines d'armements (décret en ce sens en janvier 42).
Dès l’été 41 la capacité d’Auschwitz 1 était remplie et fin 42 celle de Birkenau également.
Höss témoigne aussi du fait que l’ordre d’extermination lui a été donné à la mi-41, à Berlin. Il a alors visité le camp d’extermination de Treblinka où il est resté plusieurs heures. Il y a vu l’arrivée d’un train d’environ 2.000 personnes (c’était le nombre moyen de victimes d’un convoi, à Auschwitz également) et l’ensemble du processus d’extermination. Les chambres à gaz y fonctionnaient au gaz d’échappement et les victimes savaient, en majorité, ce qui allait leur arriver. Höss indique qu’il a voulu que ce soit différent à Auschwitz : «Ce qui importait avant tout, c’était de maintenir un calme aussi complet que possible pendant toute l’opération de l’arrivée et du déshabillage. Surtout pas de cri, pas d’agitation !» indique-t-il dans ses Mémoires. Il a ainsi notamment décidé de la mise en place de ces panneaux indiquant de supposées "douches" et lieux de "désinfection".
Au départ, Auschwitz a fonctionné comme un seul camp du point de vue de son commandement, sous la direction de Rudolf Höss. Le 11 novembre 43, Rudolf Höss et Arthur Liebehenschel échangèrent leurs fonctions. Rudolf Höss devint ainsi inspecteur des camps à Oranienburg à la pace de Liebehenschel. A partir de novembre 43, succédèrent donc à Höss :
- Arthur Liebehenschel de novembre 43 à mai 44, puis
- Richard Baer de mai 44 jusqu’à l’évacuation du camp.
A partir du 22 novembre 1943, et sur décision de Pohl, Auschwitz fut divisé en trois zones. Il y eut ainsi des chefs de camp à Birkenau : Auschwitz II, et Monowitz : Auschwitz III. Le commandant, chef du camp d’Auschwitz I, restait leur supérieur hiérarchique.
Pour Birkenau, ce furent :
- Fritz Hartjenstein de novembre 43 à mai 44, puis
- Josef Kramer de 44 à 45.
Pour Monowitz, ce fut :
- Heinrich Schwarz sur l’ensemble de la période de 43 à 45.
Dans le même temps, la responsabilité du camp de Birkenau fut répartie par une division entre le camp des femmes (sous la responsabilité de Franz Hössler) et le camp des hommes (sous la responsabilité de Johan Schwarzhuber).
On considère aujourd’hui qu’un million et demi de Juifs a péri à Auschwitz. On connaît le nombre des prisonniers jugés "aptes au travail" qui ont été tatoués : 405.222 personnes ont été ainsi enregistrées d'après O. Wormser-Migot dans Le système concentrationnaire nazi (page spécifique sur les tatouages ici). Ils représentent un pourcentage variable de l’ensemble des arrivants, plutôt faible puisque les personnes âgées, les enfants et autres personnes jugés inaptes où non nécessaires à la bonne marche du camp lors de la sélection sur la rampe étaient dirigés vers les chambres à gaz. (Pour mes choix de termes ou pour des définitions concernant le vocabulaire du camp, tels "die Selektion" ou "die Rampe" on peut se reporter au glossaire du site)
Il a été long et difficile de parvenir à un comptage des victimes qui soit fiable, d'une part car de nombreux documents n’ont pas été disponibles aux historiens durant parfois fort longtemps et d'autre part parce que la majorité des registres des SS avaient été brûlés par les SS eux-mêmes avant l'évacuation de janvier 45. Dans un premier temps, les évaluations se sont donc basées sur les témoignages donnés. On trouve ainsi dans les déclarations de SS en 1945, celle du médecin SS Fredrich Entress annonçant dans le plus grand flou les chiffres de «2.000.000 à 2.500.000 victimes, peut-être même jusqu’à 5 millions». Maximilian Grabner, le chef du bureau politique dont dépendait le service des entrées, jugé au procès d’Auschwitz à Cracovie, déclara en septembre 1945 : «Il y avait une telle quantité de morts que j'avais perdu toute vue d'ensemble et je ne pourrais plus dire aujourd'hui combien ont été tués, mais au moins 3 millions pendant que je dirigeais le bureau politique» (service auprès duquel il était resté de juin 1940 à novembre 43). Pery Broad, Unterscharführer au service politique du camp avec Grabner de juin 1942 à janvier 45 estima le chiffre des victimes gazées à 2,5 ou 3 millions. Wilhem Boger, Oberscharführer (jugé au procès d’Auschwitz à Francfort) au service politique du camp de décembre 1942 à janvier 45, l'évalua à plus de 4 millions. Ces chiffres variés montrent la difficulté d’estimation, alors même qu’ils ont été fournis en 1945, par les bourreaux eux-mêmes, quand les souvenirs étaient on ne peut plus précis. Rudolf Höss, commandant du camp, donna au procès de Nuremberg (où il fut entendu dans le cadre du jugement de Kaltenbrunner) une estimation de "3,5 millions de victimes dont 2,5 dans les chambres à gaz". On notera à ce propos que la hiérarchie SS interdisait aux acteurs d'Auschwitz (y compris le Commandant du camp) de conserver des documents permettant de comptabiliser le nombre de victimes.
[Première mise en ligne : 2006, dernière mise à jour : 2011]